L’une des affaires politiques et judiciaires les plus explosives de la Cinquième République prit fin brutalement le 23 septembre 2025, lorsque Ziad Takieddine décéda à Beyrouth, 48 heures avant le verdict attendu du procès concernant le financement libyen présumé de la campagne de Sarkozy en 2007. Ce timing, remarquable à bien des égards, fut perçu comme symbolique, presque scénarisé, car il reflétait la carrière tumultueuse d’un homme qui avait constamment dépassé les bornes.

Originaire d’un hameau druze du Liban, il s’était fait un nom comme intermédiaire particulièrement puissant dans les ventes sensibles et les contrats d’armement. Travaillant dans l’ombre, il s’était imposé comme un pont entre les arènes politiques et les exigences stratégiques des gouvernements, grâce à ses contacts et à son entregent. Ironiquement, c’est grâce à cette position privilégiée qu’il entra dans les abîmes des scandales d’État.
Informations sur Ziad Takieddine
| Élément | Détail |
|---|---|
| Nom complet | Ziad Takieddine |
| Date de naissance | 14 juin 1950 |
| Lieu de naissance | Baakline, Mont-Liban, Liban |
| Date de décès | 23 septembre 2025 |
| Âge au moment du décès | 75 ans |
| Lieu de décès | Beyrouth, Liban |
| Nationalités | Franco-libanaise |
| Profession | Homme d’affaires, intermédiaire dans les contrats internationaux |
| Spécialité | Négociation d’accords d’armement, ventes d’État à État |
| Résidence | France (jusqu’en 2020), Liban (à partir de 2020) |
| Affaires judiciaires clés | Affaires Karachi, Sarkozy-Kadhafi, blanchiment, financement politique |
| Lien utile | Article de référence |
Dans sa résidence au Liban, où il vivait en exil depuis 2020 pour éviter son extradition vers la France, son cœur s’est arrêté de battre le 23 septembre. Ce départ brutal, survenu dans un contexte juridique hautement sensible, a immédiatement suscité de nombreuses spéculations. Malgré les évocations d’une crise cardiaque par sa famille, la situation extrêmement délicate a ravivé les inquiétudes quant aux conséquences politiques de son silence obstiné.
Takieddine, principal accusateur de Nicolas Sarkozy dans le scandale financier libyen, avait d’abord détaillé dans ses allégations que l’ancien président français avait reçu des valises de billets de banque. Puis, dans un revirement spectaculaire en 2020, il a partiellement réitéré ses propos après les avoir rétractés. Perçus comme délibérés, ces fréquents revirements ont affaibli la crédibilité de ses affirmations et compliqué l’enquête.
Il se distinguait par sa capacité à se rendre à la fois indispensable et insaisissable. Il s’était entouré des personnalités les plus influentes de France, parmi lesquelles Dominique Desseigne, Thierry Gaubert, Jean-François Copé et Brice Hortefeux. Ses communications et ses comptes portaient tous ces noms, qu’il connaissait grâce à l’actualité juridique et politique. Il s’agissait de connexions non négligeables. Elles soulignaient une époque où les activités de l’État étaient fortement influencées par des réseaux capables d’ouvrir des portes en secret.
Un exemple notable est le transfert de 19 050 € découvert en avril 2004 sur les comptes de Takieddine sous le nom de « bien familial Copé », alors qu’il négociait l’accord Miksa avec le MI. Claude Guéant et Brice Hortefeux surveillaient de près cet accord, destiné à protéger les frontières saoudiennes. Ce type d’arrangement très flou illustre comment intérêts privés et activités gouvernementales peuvent parfois converger sans supervision évidente.
Si le décès de Takieddine marque un tournant important, il signifie aussi une chance perdue pour la justice. Un acteur important, imprévisible et pourtant imprévisible, qui communiquait des réalités profondes que lui seul connaissait, disparaît avec lui. Même si son témoignage était fragile, il aurait pu être contesté, reformulé et examiné. Certaines théories resteront sans fondement en son absence, faute de contradiction ou d’informations nouvelles.
Les contraintes de la justice transfrontalière sont également mises en lumière par cette déviation. Takieddine, exilé au Liban depuis 2020, avait habilement exploité le refus d’extradition de ses compatriotes pour se protéger des poursuites françaises. Cette décision géographique, qui permet d’échapper aux poursuites pénales avec une efficacité redoutable, soulève la question fondamentale des tactiques d’évitement judiciaire utilisées par les personnes riches et influentes.
C’était un homme à double facette, parfois amical et serviable, parfois hostile et rusé, selon nombre de ses proches. La tension lors de son dernier entretien avec un journaliste parisien était telle qu’une violente bagarre semblait imminente. Un homme constamment sous pression, à la fois courtisé et craint, est dépeint dans ces passages très révélateurs.
La résilience du système est un autre aspect remarquable de cette situation. Malgré de nombreuses révélations, enregistrements, transactions bancaires et aveux partiels, les répercussions politiques immédiates ont été rares. Cette perception d’un système de recherche de la vérité souvent impuissant face à des réseaux d’influence complexes est encore renforcée par la mort de Takieddine, particulièrement indésirable pour l’accusation.
Selon certains commentateurs, cette mort pourrait paradoxalement accroître la nécessité d’une plus grande transparence dans les mécanismes de financement politique. Elle rappelle avec force que le courage et la présence de témoins sont tout aussi importants dans les affaires les plus délicates que les preuves tangibles.
